Former aux enjeux socio-écologiques
La transition vers une économie et une société décarbonées, sobres et résiliantes doit plus que jamais mobiliser tous les secteurs de la société. Dans l'enseignement supérieur, il est indispensable que l'ensemble des étudiantes et étudiants soient formés aux enjeux socio-écologiques et, a fortiori, aux enjeux énergie-climat. L'ingénieur du XXIème siècle doit être moteur de cette transition écologique et énergétique. Décideur ou technicien, il doit et devra intégrer dans ses choix et ses prises de décisions des problématiques environnementales, qui ont d'ores et déjà des impacts sur la société. Il est donc essentiel que les étudiantes et étudiants soient confrontés à ces problématiques dès leur formation. « La raréfaction des ressources disponibles, l’effondrement de la biodiversité, les changements climatiques en cours, associés notamment à la problématique de l’énergie, les conséquences environnementales et sociétales des technologies actuellement développées, sont autant d’enjeux que l’ingénieur doit intégrer dans ses décisions, à la fois d’ordre technique et éthique », détaille Bertrand Raquet, président du Groupe INSA et directeur de l'INSA Toulouse.
En septembre 2020, le Groupe INSA et le think tank The Shift Project ont souhaité réunir leur force pour créer le projet ClimatSup INSA. Grâce au travail mené par les équipes INSA sur le terrain, guidées et accompagnées par les experts de The Shift Project, ClimatSup INSA va permettre d'intégrer les enjeux socio-écologiques au cœur de toutes les formations du Groupe INSA, dès la rentrée 2022. Depuis plus d'un an, une réflexion profonde est entamée pour transformer les enseignements : des groupes de travail se réunissent pour établir un référentiel commun au Groupe, qui permettra aux équipes pédagogiques de disposer d'une base solide pour, ensuite, faire évoluer leurs cours. Les enseignantes et enseignants disposeront d'un plan de formation, pour les accompagner dans ce processus.
The Shift Project est une association reconnue d’intérêt général fondée en 2010 par Jean-Marc Jancovici (cofondateur du cabinet d'études Carbone 4). C’est un think tank dont la mission consiste à éclairer et à influencer le débat sur la transition énergétique en France et en Europe. Depuis sa création, The Shift Project a initié une vingtaine de projets d’étude, participé à l'émergence de deux manifestations internationales (Business and Climate Summit, World Efficiency), et organisé une cinquantaine de colloques, forums, ateliers et conférences.
En savoir plus sur The Shift Project
La genèse du projet
En septembre 2018, des centaines d'étudiantes et d'étudiants publiaient un Manifeste étudiant pour un réveil écologique. Ils souhaitaient, par cette action, alerter sur la nécessité "d’anticiper et d’inclure dans notre quotidien et nos métiers une ambition sociale et environnementale, afin de changer de cap et ne pas finir dans l’impasse". Quelques mois plus tard, en mars 2019, The Shift Project publiait un rapport dédié à la nécessité de mobiliser l'enseignement supérieur dans son ensemble pour que les enjeux climat-énergie fassent partie intégrante des formations délivrées.
Le Groupe INSA, pour sa part, entamait dès 2018 à Lyon puis en 2020 à l'échelle du groupe, un travail de profonde réflexion autour de son modèle de formations. Cette démarche prospective, qui se poursuit en 2021, doit permettre aux établissements de repenser leurs enseignements pour accompagner les transformations de société, qu'elles soient sociétales, numériques ou environnementales.
Le contexte était donc favorable pour que le Groupe INSA et The Shift Project unissent leur force et agissent, ensemble, pour initier un projet transformant pour l'enseignement supérieur. « L’INSA Lyon était en relation régulière avec The Shift Project depuis que ce dernier avait lancé son chantier sur l’enseignement supérieur, explique Nicolas Freud, enseignant-chercheur à l’INSA Lyon et référent ClimatSup INSA. Nous avons pu constater que nous partagions le point de vue selon lequel tous les étudiants devraient être formés aux enjeux climat-énergie ».
Les ambitions de ClimatSup INSA
L’ambition de ClimatSup INSA est grande. Il s’agit à la fois d’œuvrer à une évolution profonde des enseignements au sein du Groupe INSA. Mais ce projet s’inscrit dans une démarche ouverte et s’adresse à tous les établissements d’enseignement supérieur qui souhaitent transformer leurs formations.
« Ce projet souhaite contribuer à faire évoluer la formation des ingénieurs, rappelle Clémence Vorreux, responsable Enseignement supérieur au sein de The Shift Project. L’ingénieur, sans pouvoir dire qu’il soit l’acteur le plus important de la transition, jouit incontestablement d’une position qui lui permet d’avoir un panorama sur les questions techniques et scientifiques pour aborder les enjeux écologiques. Et c’est là l’objectif de ce projet : questionner et repositionner l’ingénieur dans la société et l’économie. C’est l’aventure dans laquelle a souhaité se lancer le Groupe INSA, et c’est celle à laquelle The Shift Project, à ses côtés, a souhaité inviter toutes les écoles d’ingénieur : explorer la meilleure manière d’offrir aux ingénieurs en devenir les moyens de s’inscrire utilement dans la construction d’une société résiliente. »
ClimatSup INSA poursuit ainsi trois grands objectifs :
- Former des ingénieurs conscients, capables de comprendre et d’analyser la complexité croissante du monde dans lequel ils évoluent professionnellement ;
- Répondre à la demande de sens grandissante de la part des étudiants tant dans leur formation que dans leur future carrière professionnelle ;
- Répondre aux besoins de compétences actuels et à venir des organisations à opérer efficacement leur propre transition énergétique et écologique.
ClimatSup INSA sur le terrain
ClimatSup INSA est une aventure collective. Depuis le début du projet, dans les écoles, des référentes et référents ClimatSup INSA animent leur communauté pour insuffler la dynamique et accompagner enseignants-chercheurs, personnels et étudiants dans l’émergence de nouvelles pratiques.
À l’INSA Rouen-Normandie, Renata Troian, maîtresse de conférences pour le département MECA et le laboratoire LMN (Laboratoire de Mécanique de Normandie), est référente du projet depuis septembre 2021. Autour d’elle, une cellule projet s’est constituée, composée des responsables des départements, d’un ingénieur pédagogique et d’élèves ingénieurs. “En arrivant sur ce projet, je me suis tout d’abord rendu compte que bon nombre de collègues menaient des actions dédiées à la transition environnementale. Ma première mission a consisté à lister ces actions et à les mettre en musique dans le cadre du projet ClimatSup INSA. À l’INSA Rouen Normandie, nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur deux spécialités - Chimie et génie chimique et Génie des procédés et gestion des risques - qui sont déjà en avance de phase sur ces sujets. C’est une source d’inspiration. Ainsi, le département de chimie a d’ores et déjà retravaillé toutes ses maquettes pédagogiques en lien avec les attendus du projet qui nous lie à The Shift Project. De nouveaux modules ont été créés et chaque cours a été évalué au regard du référentiel de compétences ClimatSup INSA, qui est en cours de finalisation.”
“Cette première dynamique est essentielle pour nous car elle va permettre de créer un effet boule de neige. Mais il faut garder en tête que c’est un projet de long terme, qui demande du temps. Chaque petite impulsion est bonne à prendre. Et dans cette aventure, le soutien et la motivation des étudiantes et étudiants est une grande source de satisfaction et de motivation.”
Lire l'interview de Renata Troian, publié sur le site de l'INSA Rouen Normandie
18 mois de chantier
Après plus de 18 mois de travail, The Shift Project a présenté, le 10 mars 2022, les grandes conclusions du projet ClimatSup INSA. Ce rapport, intitulé “ClimatSup INSA - Former l’ingénieur du XXIe siècle", se présente sous la forme de trois documents, à destination de différentes cibles :
- un Guide à destination des établissements d’enseignement supérieur (écoles d’ingénieurs mais pas seulement),
- un Manifeste pour les équipes enseignantes
- un recueil de retours d’expérience du Groupe INSA et des écoles ayant elles-aussi travaillé à l’intégration des enjeux socio-écologiques à leurs formations.
Ces documents ont vocation à nourrir la réflexion de toutes les parties prenantes du secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche sur la manière dont les ingénieurs peuvent contribuer à un projet de transition socio-écologique. La publication de ce rapport est une étape importante pour le projet. Mais ce n’est que le début d’une transformation profonde des formations au sein des écoles du Groupe INSA. Le travail mené avec The Shift Project va se poursuivre pour atteindre l’objectif fixé : intégrer les enjeux socio-écologiques dans toutes les formations proposées par le Groupe INSA. Pour Bertrand Raquet, président du Groupe INSA et directeur de l’INSA Toulouse, “avec ces nouvelles compétences enseignées à nos ingénieurs, architectes et paysagistes, nous assumons pleinement nos responsabilités : dans un futur très proche, la prise en compte des enjeux socio-écologiques va devenir une brique fondamentale à détenir, quel que soit le secteur d’activité ou le métier exercé.”
Les productions
Le rapport final "Former l'ingénieur du XXIe siècle" se décline en trois volets, que vous pouvez consulter en ligne et télécharger sur le site du Shift Project.
• Le Guide
• Le Manifeste
• Le retour d'expérience des écoles du Groupe INSA
• Un document de synthèse est également disponible
ClimatSup INSA s’inscrit dans démarche ouverte : le processus élaboré par les équipes du projet a été documenté durant 18 mois et a fait l’objet de points d’étape réguliers, ouverts à la communauté INSA et mis à la disposition du public.
[VIDEO] Présentation du projet ClimatSup INSA (novembre 2020)
[DOCUMENT] Rapport intermédiaire (février 2021)
[VIDEO] Point d'étape (septembre 2021)
The Shift Project dédie une chaîne YouTube à ClimatSup INSA
Vous souhaitez en savoir plus sur le projet mené par The Shift Project en partenariat avec le Groupe INSA ? N'hésitez pas à contacter les équipes qui ont travaillé sur ClimatSup INSA.
• Damien Amichaud, chef de projet ClimatSup INSA (The Shift Project)
• Sam Allier, chargé de projet ClimatSup INSA (The Shift Project)
• Clémence Vorreux, responsable Enseignement supérieur The Shift Project
• Anne-Laure Tournier, chargée de projet ClimatSup INSA (The Shift Project) et chargée de projet Évolution de la formation à l'INSA Lyon depuis septembre 2021
• Claude Maranges, référent ClimatSup INSA (Groupe INSA)
ClimatSup INSA vu d'ailleurs
Plusieurs établisssements d’enseignement supérieur internationaux s’intéressent au chantier ClimatSup INSA. Parmi eux, l’École de technologie supérieure (ÉTS) de Montréal, qui travaille depuis plusieurs années à l’intégration des notions de durabilité dans ses enseignements. Michel Huneault, Directeur des affaires académiques à l’ÉTS, revient sur l'intérêt porté à ClimatSup INSA et sur la stratégie de son établissement.
"L’ingénieur du 21e siècle ne manque pas de défis environnementaux : lutte contre les changements climatiques, perte de biodiversité, ressources limitées et enjeux énergétiques pour en nommer que quelques-uns. La complexité croissante du monde dans lequel nous évoluons nous oblige à repenser le cursus de l’ingénieur. Les documents produits par l’initiative ClimatSup INSA s’avèrent très utiles puisqu’ils sont explicites sur comment mettre en œuvre ce chantier de façon concrète.
Depuis plusieurs années, l'ÉTS se fait un devoir d’intégrer des notions de durabilité dans l’enseignement. La politique de développement durable de l’établissement comporte d’ailleurs deux orientations sur cette thématique : devenir un acteur majeur du développement des compétences en ingénierie durable en soutenant les départements et les professeurs dans l’inclusion des compétences clés en développement durable dans l’enseignement et favoriser l’intégration et la mise en application des notions de DD par les étudiants. Le cours Outils de développement durable pour l’ingénieur, qui a pour objectif de définir le rôle de l’ingénieur dans l’opérationnalisation du développement durable, est offert aux étudiants de premier cycle cycle. Une équipe multidisciplinaire travaille également sur la création d’un programme de baccalauréat en génie de l’environnement qui sera prochainement ouvert. Le Centre d’études et de recherches intersectorielles en économie circulaire (CERIEC) est installé à l’ÉTS depuis 2020 ce qui a permis d’accélérer l’intégration des notions d’économie circulaire dans l’enseignement. Ceci se traduit par l’offre d’une formation en ligne ouverte à tous (un MOOC), ainsi qu’un nouveau cours de niveau maîtrise en économie circulaire.
De par sa quête d’exemplarité en termes d’actions sur le campus, l’ÉTS souhaite inspirer sa communauté et d’autres organisations. L’École est devenue la première université carboneutre à Montréal en juin 2021 et a créé le Fonds de recherche ÉTS sur les changements climatiques. En 2022, l’ÉTS a obtenu le niveau or de la certification STARS qui reconnaît la démarche en développement durable des établissements d’études supérieures à l’échelle internationale. Finalement, depuis trois ans, les initiatives en termes de biodiversité urbaine se multiplient sur le campus de l’ÉTS et la mobilisation de la communauté étudiante est en croissance continue."